L’expé de canot est bel et bien lancée. La grisaille marque notre départ du site de la Chute blanche. Mais, un peu comme par magie, les nuages se dissipent lentement au fur et à mesure que la journée progresse. À l’image du rideau qui se lève devant la scène pour laisser place au spectacle, le temps maussade s’estompe et, à l’heure du midi, le ciel se teinte de bleu. Et ce soir, il brille de mille feux. JF joue de la guitare autour du feu avec Catherine L., Marie-Claude, Bertrand, Martin, Héléna, Alain, Mario. Les autres rigolent à plein poumons dans les tentes derrière moi. Pour ma part, je suis assis au bord de la rivière, bercé par le clapotis de l’eau caressant la Pointe-aux-fraises. Ça sent bon le bonheur. Et la guimauve brûlée.
L’expé de canot est belle. Et bien lancée. Nous nous sommes mouillé les mollets pour la toute première fois une dizaine de kilomètres en aval du point de mise à l’eau initialement prévu. En effet, le niveau de la rivière étant anormalement élevé pour ce temps-ci de l’année, nous avons cru plus sage d’éviter de cordeler ou même de portager le rapide du brulé, un classe 3 de 1,5km de long.
Ce sera suite à une opération d’empaquetage laborieuse que Mario tient un atelier d’initiation au canotage. Les jeunes apprennent vite et veulent pagayer. Ils sont même un peu déçus de devoir arrêter pour le repas du midi… On leur apprend à faire un feu. Ils nous apprennent à nous amuser avec des riens : Adam nous fait le coup du championnat mondial du je-vais-lancer-un-pierre-plate-et-faire-le-plus-bonds-possible.
Quelques coups de pagaie plus tard, nous voici à la Pointe-aux-fraises. Pour peu, il aurait pu s’agir de la Pointe-à-la fraise : nous n’en en avons trouvé que 3. Minuscules en plus. La vue est néanmoins superbe : au loin poind la Montagne de la Tour. Alain, notre guide, nous explique que son oncle y était gardien au milieu du siècle dernier, alors qu’il devait surveiller les feux de forêts environnants. La Pointe-aux-trois-fraises fera office de site pour notre premier campement de canot-camping. On leur fait une démonstration de montage de tente. Ils nous font une démonstration de collaboration et de travail d’équipe.
De manière paradoxale – et pratiquement incongrue -, plus nous nous enfonçons en forêt et laissons derrière nous la civilisation, plus la zone de confort des jeunes semblent s’élargir. Ils sont 9. Et ils semblent tous se conforter de notre glissade au creux de cette délicieuse incertitude qu’est l’aventure.
Ils vous embrassent. J’en suis certain.